On regarde parfois dans les cernes du bois pour connaître l'âge d'un arbre, mais le bois nous raconte bien plus. J'aime tourner du bois qui ne « paie pas de mine » ou que l'on ne veut pas ou qui est destiné à être brûlé. Une fois tourné il nous révèle un peu de sa vie que je cherche à mettre en valeur et à lui en redonner un peu. On y découvre souvent de belles choses.
Sur cet exemple on peux voir comment j'aborde le tournage, le choix du bois, son placement, les choix techniques et le tournage… Découvrir un peu de ce qui me plaît dans cette activité. Comment une pièce de bois brut se transforme petit à petit avant de devenir un objet décoratif (ou utile). Un morceau de bois destiné à la destruction ou au feu retrouve une nouvelle utilité. Pour le plaisir de le travailler, d'en faire un objet utile ou simplement pour le plaisir des yeux.
Ce morceau de bois de prunier est celui qui va être placé sur le tour afin d'être tourné. Ce tronc n'est absolument pas régulier et c'est qui en fait son attrait. L'arbre à bien souffert : arrachage et diverses attaques.
Il est attaqué au cœur par arrachage mais aussi par les champignons et pourritures. Il va être délicat à tenir, la partie ouverte risque d'être très fragile. On ne sait pas trop quelle quantité de bois il va rester en cours de tournage et peut-être qu'au final il ne sera pas si intéressant que ça et qu'il finira quand même au rebut !
On va bien voir ce que l'on va pouvoir en faire…
Le placement sur le tour est un élément essentiel car il est déterminant dans le rendu final. On peut faire des choix très différents en fonction des morceaux. On peut placer l'axe dans le sens longitudinal, mais aussi transversal. Selon le choix qui est fait le veinage n’apparaîtra pas de la même façon et on pourra (ou pas) garder une partie de l'écorce. Dans les pièces que je tourne, je garde généralement l'écorce car j'aime ce coté naturel et les formes qu'elle génère. Ici, étant donné la blessure qu'a subit l'arbre, peu de choix possibles. Il faut toutefois trouver un emplacement qui tienne la route mécaniquement parlant et qui permette de garder suffisamment de matière
Le début du tournage nous révèle les premiers aspects de la pièce et donne un début d'idée de ce qu'elle va devenir. C'est en effet elle qui donne la direction à suivre car même si on peut se dire j'y verrai bien telle ou telle forme, l'avancement du tournage nous révèle des choses qu'on ne peut pas imaginer tout de suite. Le bois nous fait suivre des chemins différents et au final nous donne des résultats plutôt inattendus. Ici le bois a été fraîchement coupé, ce qui veut dire qu'il contient encore beaucoup d'humidité qu'il rejette au fur et à mesure du tournage (on voit les projections sur le mur) ; On dit que l'on travaille du bois « vert ».
Le creusage de pièces comme celles-ci est plutôt délicat. Le bois n'est pas régulier et les efforts qu'il subit pendant la coupe sont importants. Il faut le maintenir le mieux possible pour éviter qu'il soit projeté et qu'il soit le plus stable possible.
On commence aussi à deviner les contours de la future pièce (en espérant qu'elle tienne car elle va subir encore pas mal d'efforts!)
Le bois va en grande partie évacuer son humidité pendant le tournage et on commence déjà a voir des parties plus claires qui sont un peu plus sèches.
Les dernières étapes sont délicates également. Elles sont régulièrement le fruit de nombreuses déceptions car la pièce peut encore se casser pendant la « séparation » avec la partie qui a servi de maintien.
La pièce commence aussi a recevoir sa finition. Le bois a déjà évacué une bonne partie de son humidité. Plus il est travaillé fin et plus il en a évacué pendant le tournage et moins les tensions sont fortes pendant la fin du séchage. Il continuera a sécher même après le tournage et malgré la couche de finition. Il se déformera légèrement aussi donnant un charme supplémentaire à la pièce.